Présentation de Arnold August: La guerre peut-elle jamais être justifiée ?
Débat en ligne organisé par World BEYOND War le 21 septembre 2022, Journée internationale de la paix.
David Swanson, auteur, activiste, journaliste et animateur de radio, a soutenu que la guerre ne peut jamais être justifiée. Il est directeur exécutif de World BEYOND War et coordinateur de campagne pour RootsAction.org. Les livres de Swanson incluent War Is A Lie. Il anime Talk World Radio. Il est nominé pour le prix Nobel de la paix et récipiendaire du prix américain de la paix.
Argumenter que la guerre peut parfois être justifiée était Arnold August, un auteur montréalais de trois livres sur les États-Unis/Cuba/l'Amérique latine. En tant que journaliste, il apparaît sur TelesurTV et Press TV commentant des questions géopolitiques internationales, est rédacteur en chef pour The Canada Files et ses articles sont publiés dans le monde entier en anglais, français et espagnol. Il est membre de l'International Manifesto Group.
Le modérateur était Youri Smouter, animateur de 1 + 1, une émission d'histoire et d'actualité sur sa chaîne YouTube 1 + 1 animée par Yuri Muckraker alias Youri Smouter. Il est basé dans le sud de la Belgique et est un critique des médias de gauche, un critique d'ONG, un anti-impérialiste, un défenseur de la solidarité autochtone et un mouvement Native Lives Matter et un penseur socialement libéral.
La directrice de l'organisation de la WBW, Greta Zarro, s'occupait du support technique, du chronométrage et des sondages.
Les participants sur Zoom ont été interrogés au début et à la fin de l'événement sur la question « La guerre peut-elle jamais être justifiée ? Au début 36% ont dit oui et 64% non. A la fin, 29% ont dit oui et 71% non.
VIDÉO : Débat en ligne : la guerre peut-elle jamais être justifiée ?
Yourie Smouter:
– J’aimerais maintenant vous présenter Arnold August. Permettez-moi de vous rappeler brièvement de qui il s’agit.
Arnold habite au Canada et a signé trois ouvrages à propos des États-Unis, de Cuba et de l’Amérique latine. Comme journaliste, il est souvent invité à teleSur et Press TV pour commenter la situation géopolitique à l’échelle internationale. Il est aussi éditeur collaborateur pour The Canada Files, et ses articles sont publiés partout dans le monde en anglais, en français et en espagnol.
Il est membre du Groupe international du Manifeste, et soutient que certaines guerres peuvent se justifier.
Arnold, la parole est à toi. N’oublie pas d’activer ton micro.
Arnold August:
– Alors merci beaucoup de cette présentation, et merci à David et Yuri d’avoir organisé cette activité et de m’avoir invité.
J’ai apprécié la présentation de David, tout comme les livres que tu avais écrits et que j’ai lus avant la présentation d’aujourd’hui.
Voilà.
L’État colonisateur et impérialiste suprématiste blanc états‑unien et ses alliés de l’OTAN (comme l’État colonisateur suprématiste blanc du Canada, notoirement connu pour son génocide des peuples autochtones dans notre pays) sont en guerre contre la Russie par l’entremise de leur guerre par procuration sous le couvert du régime Zelensky infesté de nazis.
Cependant, cette guerre a commencé bien avant le 24 février 2022, c’est-à-dire il y a au moins huit ans à l’occasion d’un coup d’État pronazi soutenu par les États‑Unis en Ukraine, pour s’assurer que cette dernière reste dans le giron états-unien. Cette situation a mené à un nettoyage ethnique et au bombardement des populations des régions russophones du Donbass, qui ont causé plus de 14 000 morts et un million et demi de personnes déplacées.
À l’instar de nombreux autres commentateurs de la presse alternative aux États-Unis et au Canada, l’avocat états-unien et professeur de droits internationaux de la personne, Dan Kovalik, après avoir passé en revue les faits historiques ayant conduit au 24 février 2022, décrit dans un premier temps les violations du cessez-le-feu par l’Ukraine en 2000 au Donbass. Il souligne ensuite que les services de renseignements russes indiquent qu’une invasion massive du Donbass est imminente, avant de conclure : « Je crois que la Russie a été mise dans une position qui ne lui laisse guère d’autre choix que d’intervenir. » Si la Charte des Nations Unies interdit les actes de guerre unilatéraux, Dan rappelle que c’est cette même charte qui édicte l’article 51, selon lequel « aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective ». Selon Dan, l’interprétation de l’article 51 suppose le droit de se défendre contre des attaques armées réelles, mais aussi contre la menace d’attaques imminentes. Il conclut en soulignant que l’opération militaire spéciale (OMS) russe constitue un cas classique d’autodéfense collective. Cela étant, je soutiens que l’opération militaire spéciale se justifie.
Outre la guerre militaire, considérons les deux autres visages de la guerre, à savoir la guerre culturelle et la guerre économique par des sanctions. Si le conflit actuel prend naissance en 2014, la guerre culturelle (c’est-à-dire celle des idées et de l’idéologie) remonte à la révolution bolchévique de 1917 ainsi qu’à la révolution chinoise de 1949. À l’heure actuelle, c’est la guerre culturelle qui occupe essentiellement le conflit entre les États-Unis et l’OTAN, d’une part, et la Russie, d’autre part. La cible, c’est le communisme. Les grands médias du cercle États-Unis–OTAN qualifient souvent la Russie de communiste – par voie détournée bien sûr –, notamment lorsqu’ils ponctuent leurs reportages d’images où l’on brandit le drapeau de l’URSS et la faucille et le marteau. Je suis sûr que plusieurs d’entre vous avez déjà vu cela dans ces reportages. Ces allusions tout à fait sublimes au fil de leur couverture exhaustive du conflit sont si efficaces que, d’après un récent sondage, 42 % des États‑Uniens pensent réellement que la Russie est communiste. Bien entendu, les politiciens ainsi que les médias des États-Unis et de l’OTAN jouent sur les deux tableaux : lorsqu’elle dénonce les oligarques russes, l’administration Biden sous-entend que ces communistes sont hypocrites puisqu’ils ont même des oligarques.
La guerre culturelle que mènent les États-Unis et l’OTAN contre la Russie vise également la Chine. Toutefois, contrairement à ce qui prévaut pour la cible russe, cette guerre-ci est une guerre ouverte contre le communisme et le Parti communiste chinois. Ce que cherchent en réalité les États-Unis et l’OTAN en s’impliquant militairement en Ukraine – leur objectif –, c’est d’affaiblir la Russie pour ainsi mettre en péril l’alliance grandissante entre cette dernière et la Chine. Voilà qui répond à l’objectif de l’OTAN de contenir l’influence croissante de la Chine sur la scène internationale.
Comme on l’a mentionné précédemment, la guerre culturelle contre le communisme remonte à la révolution bolchévique de 1917. Qu’en est-il? Selon le politologue états-unien Michael Parenti, la crainte qu’entretiennent les États-Unis et l’OTAN à l’égard de toute alternative au capitalisme remonte à l’invasion de la Russie en 1918 par les pays occidentaux – pour les mêmes motifs –, après la révolution de 1917.
En référence à la période précédant la Seconde Guerre mondiale, Parenti rappelle que certains dirigeants occidentaux avaient espéré aiguiller l’expansionnisme allemand vers l’est au détriment de l’État soviétique. À part quelques-uns, ils étaient plus préoccupés par le spectre bolchévique que par la réalité fasciste. Certes, la puissance émergente d’Hitler créait un malaise grandissant, mais le fascisme ne suscitait pas chez eux une peur et une aversion aussi patentes que le communisme. C’est un élément très important lorsqu’on analyse la situation ukrainienne en 2022.
On le constate maintenant, les États-Unis et l’OTAN sont tout à fait à l’aise dans leur alliance avec les nazis ukrainiens contre le communisme, même si chacun sait que la Russie n’est nullement communiste. C’est plutôt son alliée la Chine qui l’est.
Poutine ne défend pas le socialisme, mais son message au sujet de l’OMS s’inscrit invariablement dans une volonté de dénazification et d’opposition à l’hégémonie mondiale des États-Unis. De toute évidence, cela va à l’encontre de l’argumentaire des États-Unis et de l’OTAN que nous venons d’illustrer. En outre, Poutine doit faire face à l’influent Parti communiste de la fédération de Russie ainsi qu’à des millions de Russes qui voient encore l’URSS d’un bon œil, que ce soit à cause de leur expérience vécue du système ou de la défaite du fascisme d’un point de vue historique. En soi, il y a là un motif suffisant pour les citoyens des pays de l’OTAN de cesser d’appuyer cette guerre totalement injuste des États-Unis et de l’OTAN pour soutenir plutôt la position de la Russie en Ukraine.
Il existe aussi une autre facette importante dans cette guerre culturelle, surtout depuis le 24 février 2022, où l’on cherche à amalgamer communisme et fascisme. On brandit maintenant le pacte de non-agression de 1939 entre l’URSS et l’Allemagne pour prouver que nazisme et socialisme sont bonnet blanc et blanc bonnet. Voilà qui permet de justifier la guerre actuelle des États-Unis et de l’OTAN contre la Russie. Or, quels sont les faits historiques? Parenti est sans équivoque : à l’époque, écrit-il, Moscou s’était souvent montrée ouverte à conclure des pactes de sécurité collective avec les États occidentaux afin de contenir l’agression nazie. Cependant, toutes ses tentatives avaient été repoussées du revers de la main par l’Occident. Frustrée dans ses tentatives de former une alliance antinazie et croyant (à juste titre) qu’elle était elle-même (la Russie, l’Union soviétique) la cible de l’agresseur nazi, l’URSS avait fini par signer un traité de non-agression de dernière minute avec Hitler, en 1939, pour détourner toute attaque immédiate des forces allemandes. On constate donc ici que l’Occident n’hésite pas à déformer complètement l’Histoire au profit de sa guerre perpétuelle contre le communisme.
La guerre culturelle qui se joue actuellement comporte donc ces deux facettes complémentaires, à savoir prendre le communisme pour cible et faire l’amalgame entre fascisme et communisme, voyez-vous. Par conséquent, les peuples du monde sont aujourd’hui confrontés à ce qui est sans doute l’une des guerres culturelles les plus sournoises que nous ayons connues depuis 1917, selon moi, compte tenu des médias sociaux modernes et des chaînes télévisées d’information continue, dont le libéral CNN en tête de pont. Avec son OMS, Poutine occupe une position déterminante pour mener une guerre d’idées contre l’amalgame fallacieux qu’on voudrait faire avec le fascisme de la Seconde Guerre mondiale et l’URSS. Sous cet angle, l’OMS russe en Ukraine se justifie. C’est justifiable. Si on laisse progresser dans l’opinion des gens l’idée que fascisme et communisme sont du pareil au même, alors c’est au nom de l’antifascisme que les États-Unis et l’OTAN pourront bientôt déclencher la Troisième guerre mondiale contre la Russie et éventuellement la Chine. Voilà une raison qui, à elle seule, devrait inciter les pacifistes qui encouragent encore aveuglément les États-Unis et l’OTAN à changer de discours.
On a donc déjà traité de la guerre militaire et de la guerre culturelle. Il ne reste plus que le troisième visage : la guerre économique par l’entremise de sanctions. Posons la question : si cette guerre économique et ces sanctions sont aussi justifiées qu’on le prétend, comment se fait-il que près de 90 % de la population mondiale ait refusé d’emboîter le pas?
La paix. Aujourd’hui particulièrement, nous souhaitons la paix. À mon sens, il nous incombe à nous, pays de l’OTAN, d’inciter nos gouvernements respectifs pour qu’ils fassent pression sur l’Ukraine en faveur d’un accord de paix négocié qui tienne compte des préoccupations de la Russie, et pour qu’ils appuient l’OMS russe et les référendums qui se tiendront bientôt dans l’est de l’Ukraine, en vue d’accroître la pression sur les États-Unis pour forcer une négociation, et peut-être favoriser la paix que nous souhaitons tous. Merci.
Arnold August: You Tube, Français.
https://www.youtube.com/watch?v=x2irgwDGCPU
Pour regarder le débat au complet :
https://worldbeyondwar.org/fr/video-online-debate-can-war-ever-be-justified/
Note de l’Éditeur: Les Dossiers Canada (LDC) effectue depuis 34 mois des reportages d’enquête critiques sur la politique étrangère impérialiste du Canada. Nous avons clairement accumulé un bilan exposant la vérité que l’Establishment politique canadien vous cache. Nous pouvons en faire tellement davantage – mais seulement avec votre soutien financier.
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